François COUPERIN
L'œuvre d'orgue
Il s’agit de pièces d'orgue consistant en deux Messes : l'une à l'usage ordinaire des Paroisses pour les fêtes solennelles, l'autre propre aux Couvents de religieux et religieuses, composées par F. Couperin Sr de Crouilly, organiste de St Gervais (1690).
François Couperin est âgé de 22 ans seulement lorsqu'il publie ses deux Messes. D'une écriture extrêmement habile, portant à un haut niveau l'héritage français du dernier quart de siècle des organistes de Louis XIV, et agrémenté de quelques touches italiennes, les 42 pièces de l'œuvre d'orgue de Couperin annoncent déjà, en demi-teinte, les "Goûts Réunis".
« Les deux Messes de François Couperin apparaissent comme deux fleurs printanières, merveilleuses, extraordinaires, écloses en cette fin du XVIIème siècle, sur une tige qui puise ses racines à la fois dans les orientations du Concile de Trente et dans l'évolution typique de la musique française sous le règne de Louis XIV. » (Georges Beyron)
A propos des plains chants, dans sa "Méthode nouvelle pour apprendre parfaitement les règles du Plain Chant et de la Psalmodie", Monsieur de la Feillée, en 1670, nous indique que « il ne faut pas faire de cadence, autrement de tremblement, lorsque l’on chante en chœur... mais lorsqu'un seul chante une pièce, il lui est permis de chanter le plus proprement qu'il peut et d'orner sa voix sans trop d'affectation. »
C'est le choix soliste, avec Michel Laplénie (basse-taille) qui a été réalisé ici dans l'alternance entre les versets d'orgue. Les plains chants sont accompagnés à l'orgue par une basse continue. La basse chiffrée correspondant à la Messe des Paroisses a été écrite par Michel Chapuis et celle des Couvents par Bernard Coudurier, qui réalise ces continuos, dans l'esprit du continuo adapté au Motet français, avec la basse sur le clavier du grand orgue en 16 pieds et la main droite sur le positif avec le bourdon de 8 pieds.
Musique d'un très jeune musicien, brillante mais émouvante, forte mais fragile, déjà profonde mais non douloureuse, cette nostalgie s'insinuera peu à peu dans sa musique vocale et dans celle pour clavecin : « J' avouerai de bonne foi que j'aime beaucoup mieux ce qui me touche que ce qui me surprend ».
Il faut absolument lire l'extraordinaire "Portrait de l'artiste" ainsi que l'essai de l'analyse de la vie, de la vie familiale et de l'approche psychologique de ce mystérieux personnage à travers sa musique et des éléments historiques présents dans l'ouvrage de Philippe Beaussant : "François COUPERIN", paru chez Fayard.
Bernard Coudurier, c'est la déclamation baroque à son apogée : beaucoup d'inégalité expressive, une multitude merveilleusement calculée d'effets convenus- le style - pourvoyant on ne peut mieux à ce sentiment de liberté sophistiquée, d'improvisation apparente, rehaussée par une ornementation très individuelle. A noter les quatre Suites de Guilain, Allemand totalement francisé, merveilles de concision et d'homogénéité stylistiques, portée très haut par Coudurier sur la merveille d'Albi.
Diapason
L' Art du Grand Siècle à son apogée ... Coudurier s'y montre un modèle d'élégance et de grandeur louis-quatorzienne ... L'intégration de l'ornementation, très vocale, est d'une réalisation particulièrement vive et raffinée. L'inégalité expressive se pare ici d'une sensation très sophistiquée d'improvisation apparente, source à la fois d'aisance et de distance. Le plain-chant, par le timbre racé de Michel Laplénie, parvient, en harmonie aux mêmes sommets. Le souffle et la vibration même de la voix - manière de premier degré dans l'ornementation baroque - deviennent ici la source vive d'une grande richesse d'inflexions vocales pour une réelle magie de l'incantation. Pour les Messes d'orgue proprement dites comme pour l'alternance : une version de référence.
Guide de la Musique ancienne et baroque
La réedition des Messes de Couperin par Bernard Coudurier est bienvenue. Non seulement elle nous permet d'entendre les sonorités époustouflantes de l'orgueMoucherel/Formentelli d'Albi, mais surtout, elle nous rend une interprétation haute ne couleur, où l'éclat des jeux rivalise d'invention et d'imagination. Et qui plus est, elle est complétée par les quatre Suites d'orgue pour le Magnificat de Jean Adam Guilain. Cette version présente en outre la particularité du plain-chant alterné non pas avec un choeur mais avec un soliste en la personne de Michel Laplénie, fondateur de l'ensemble Sagittarius. Chacune de ses interventions est accompagnée par une basse continue à l'orgue.Son plain-chant, sobre et mystique, témoigne de la manière dont on l'interpréyait au XVIIIème siècle : en valeurs égales, alternances de longues et de brèves, en enflant progressivement le son de la voix.
Cette version des deux Messes est à l'image du buffet de l'orgue : majestueuse, triomphale, stylée, colorée, imposante mais jamais écrasante. Le jeu de Bernard Coudurier s'empare avec noblesse et beaucoup de lyrisme de ces oeuvres liturgiques, restituant avec une rare intelligence les lignes contrapunctiques ainsi que les ornements. Une leçon de grand style musical ...
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